Le jour de J.

vendredi 7 mai 2010, par Franck Garot

Pour moi, le samedi 20 mars 2010 sera le jour de J.

Il commence à 12 h 03, Issy-les-Moulineaux, bus 123. Vitres chauffées par le soleil du premier jour du printemps. Des cabas, des caddies, jour de marché, jour de supermarché. De la vie plein la gueule. Je pense à J.

12 h 15, métro ligne 12. Dans la rame, les couleurs mêlées des visages des vêtements. La France comme une pub Benetton. Station Saint-Lazare, logo jaune et bleu de la firme suédoise. De vrais canapés installés au pied de leur pub. Je me demande si les clodos ont été chassés à coups de pied au cul. Je pense à J.

12 h 45, gare Saint-Lazare. Avant d’entrer dans un tableau de Monet, la sculpture d’Arman me rappelle les horloges de Dalí. Le temps, le temps, le temps, le temps… Je pense fortement à J.

13 h 10, voie 19, train 3309, voiture 14, place 31. Je voudrais noter tout ce que je vois, à travers la vitre, à la manière de Joachim Séné. Mais ce train dont je connais le trajet par cœur – combien de fois l’ai-je pris ? – charrie les souvenirs qui m’emportent loin, vers une autre vie, étudiante, avec ses rêves, avec mes amis, dont J. Je pense à lui.

15 h 04, Caen, tram A. Je traverse la ville, je ne reconnais rien, comme après un déluge, tout a changé, pour le mieux néanmoins. Me reviennent par bribes quelques images, un amphi de la fac des sciences, une chambre de Crous, ce concert de Jad Wio avec Yo, un oral de rattrapage pour le bac, un vrai hold-up ce bac, et J. meilleur que moi l’avait raté cette année-là. Je pense encore à J.

15 h 30, CHU, 13e étage, chambre 208. Je retiens mes larmes, j’entre, et J. me sourit.


Publié le 7 mai 2010 chez Joachim Séné à l’occasion des Vases communicants.

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